Prologue :
Les All Starz, les White Tigers et les Bladebreakers étaient furieux. Ils étaient assis dans la suite d’hôtel de Tyson (avec les Majestics), fous de rage. Maintenant que les évènements du championnat du Monde étaient finis, tout comme les évènements du lac, ils étaient perdus et confus, ainsi que – bien que ce soit compréhensible – très énervés. Et aucun ne l’était plus que Tyson.
Le jeune japonais faisait les cent pas, les poings crispés et les yeux noirs de haine et de colère. Pour qui Monsieur Dickenson se prenait-il, de dire que Tala l’avait laissé gagner leur match ? Comment osait-il suggérer que tous ses efforts avaient été en vain car Tala était plus fort et que s’il l’avait voulu, il l’aurait vaincu ?
Il pleuvait dehors, la température avait augmenté après le match, et à présent une pluie glacée assaillait les rues de Russie. Les équipes étaient ennuyées et en colère. Kai les avait menés en bateau. Non seulement était-il un incroyable beyblader qui avait plus de capacités que quiconque pouvait imaginer, mais il était aussi un excellent acteur. Personne n’avait vu à travers son masque. Personne n’avait vu quoi que ce soit.
« Comment ose-t-il ? » Cria Tyson, frappant le mur en face de lui. Les autres équipes frémirent en entendant le bruit mais ne dirent rien. Ils étaient tous plongés dans leurs pensées.
Kai sortit du bâtiment, ses cheveux lui fouettant le visage à cause le vent. Pour la première fois depuis longtemps, il se sentait en paix. Comme si un énorme poids avait été retiré de ses épaules. Tyson se précipita vers lui, cet énervant sourire qu’il possédait collé sur le visage, et ses mains faisant de grands gestes. Kai le laissa le prendre dans ses bras, ce n’est pas comme s’il aurait pu y échapper de toute manière.
Il adressa un regard aux Bladebreakers. Cette équipe qu’il avait utilisé encore et encore. Il l’avait fait pour une bonne cause, mais ça ne changeait pas le fait qu’il l’avait fait. Il savait que les autres équipes lui en voulaient encore, mais il savait aussi que leurs membres comprendraient quand le temps serait venu (Et si ce n’était pas le cas alors ça ne le gênait pas plus que ça. Il s’en moquait de toute façon.).
Ils allaient retourner à l’hôtel ; c’était tout ce qu’il restait à faire. Après la cérémonie de récompense… mais avec la police en chemin pour arrêter Boris à ce moment même, il doutait que la cérémonie ne prenne place avant quelques jours. Il ne put s’empêcher de laisser un sourire plaisant traverser son masque. Tout s’était déroulé à merveille.
Tala avait perdu, comme prévu, Bryan avait perdu… pas tout à fait comme prévu, et les Bladebreakers avaient gagné. C’était aussi simple que ça. Quand les Demolition Boys traverseraient le hall jusqu’à leurs vestiaires, la police serait là. Elle ferait en sorte qu’ils quittent le bâtiment indemnes, et que Boris Balkov ne soit pas avec eux. Kai avait vu le clin d’œil que le rouquin lui avait envoyé alors qu’il rejoignait le hall. Pour la première fois depuis des années, ils étaient libres. Pour la première fois depuis des années, Kai envisageait de changer son nom.
Il pouvait déjà voir le sourire sur le visage de Luka
quand il lui en parlerait. Il aurait un sourire radieux, l’enlacerait probablement, l’appelant de ce nom qui avait été tabou pendant des années, puis l’accueillerait de nouveau dans la famille. Les autres seraient notablement excités aussi… Ce serait l’occasion d’une fête. Voltaire était, bien sûr, invité. L’homme avait été là lorsqu’il avait rejeté le nom… Maintenant il serait là lorsqu’il le prendrait à nouveau.
Kai leva les yeux vers la neige qui tombait sur lui. Il entendit son équipe s’immobiliser à cause de la confusion. Il n’y avait de neige nulle part… à part au dessus de lui
. Il fronça les sourcils et se décala à gauche. La neige hésita, puis le suivit. Il leva les yeux mais il n’y avait pas de nuages. Juste… de la neige. Il regarda à nouveau ses coéquipier. Ils étaient aussi perplexes que lui, quand un souvenir lui revint soudainement et il se mit à rire légèrement, ignorant les visages incrédules des nouveaux champions. Il regarda autour de lui et repéra le garçon qui était dans ses pensées peu de temps avant.
Ses cheveux rouges étaient attachés dans une queue de cheval à la base de son cou ; et il portait un long manteau blanc au dessus d’une chemise et d’un pantalon bleu marine. Il souriait, insouciant et extatique, et Kai leva à nouveau les yeux vers la neige au dessus de lui. Il rit, il ne pouvait pas s’en empêcher. De l’autre côté de la rue il y avait un garçon qui avait enfin gagné sa liberté après une vie d’emprisonnement. Au dessus de lui, il y avait une neige impossible et pourtant magique, et derrière lui il y avait quatre garçons stupéfiés qui ne pouvaient pas croire ce qu’ils voyaient.
Kai était en train de rire. Pas le rire fou et maniaque du taré qui les avait attaqués sans pitié, mais le rire d’un garçon heureux qui n’avait que le bonheur qui l’attendait. Il regarda l’autre côté de la rue. Le roux riait aussi. Il gloussait de délice, et il y avait de la neige au dessus de lui aussi. Vêtu de ces habits flambant neufs et avec un sourire jusqu’aux oreilles, il se mit à tourner sur lui-même, la joie semblant radier de chaque part de son corps.
« Comment te sens-tu, Luka ? » lui envoya Kai en faisant quelques pas dans la rue. Ses coéquipiers le regardèrent avec incrédulité alors que la neige le suivait. Ils n’arrivaient toujours pas à comprendre. Le roux leva les yeux, ses yeux brillant d’amour et d’une lumière qu’on ne pouvait pas éteindre.
« Je me sens-… » Un bruit de freins interrompit la scène. La neige s’arrêta ; la toupie qui dansait au milieu de la rue – complètement écrasée. Les expressions des deux garçons se chargèrent d’horreur. Le roux regarda la voiture qui se dirigeait droit sur lui. Il n’avait pas le temps de se décaler, la pédale d’accélération était enfoncée.
« LUKA ! » Le garçon eut à peine le temps de croiser le regard de Kai avant que la voiture ne soit sur le point de le heurter, lui, l’adolescent qui dansait de joie une minute plus tôt.
Il pleuvait encore plus à présent, et Tyson faisait toujours les cent pas. Il jeta un regard noir à la tempête, comme si elle était la cause de tous ses problèmes, et il continuait de serrer les poings. Tout avait été parfait avant que Mr Dickenson ne leur raconte ça. Ils avaient voulu savoir une chose et avaient reçu plus qu’ils ne l’espéraient.
Tala avait sacrifié le match. Il avait fait exprès de perdre ce maudit match et maintenant Tyson était le possesseur d’une victoire qu’il ne méritait pas. Il était furieux. Il les haïssait et il ne parvenait pas à croire qu’on l’ait trompé. Il se retourna, prenant note des blessures de Ray. Le garçon était dans un état terrible, et ça ne lui plaisait pas non plus.
Ray avait été massacré pour rien. Il n’était blessé pour aucune raison. C’était quelque chose que Tyson ne pouvait pardonner. Comment Bryan osait-il le blesser juste pour le blesser ? Comment osait-il ? Tyson ne pouvait pas croire à ce qu’il se passait. Il ne pouvait pas. Ça ne voulait pas s’incruster dans sa tête quoi qu’il arrive.
« Ce n’est pas juste ! » cria-t-il à personne en particulier.
« La vie n’est pas juste. » répondit simplement Ray. Comment pouvait-il être si calme alors que Tyson bouillait de rage. Ce n’était pas juste non plus.
« Kai nous a trompés ! »
« C’est vrai, mais il a sauvé le monde… »
« Tu t’attends à ce que j’y croie ? »
« Tu as entendu aussi ce que Mr Dickenson a dit… Kai et les autres sont membres de l’Agence de Sécurité Internationale Division Beyblade*. …Ils étaient en mission, et ils l’ont réussie. » marmonna Kenny qui ne semblait pas plus joyeux à propos de la situation que les autres.
« Je m’en fiche, et qui avait déjà entendu parler de cette ISABD* au juste ? » claqua Tyson en colère, il ne voulait pas avoir affaire à la logique de Kenny.
« La Russie ne fait même pas partie de l’ISA… Je parie que c’est n’importe quoi. » murmura Emily, croisant les bras. Dans sa main était son spectre. Elle ne l’avait pas lâché depuis qu’il lui avait été rendu.
« Exactement ! »
« En cas d’urgence, parfois, des mesures spéciales sont prises pour assurer le bien du monde… le sauver leur a sûrement permis de plier les règles légèrement, et je suis sûr que L’ISABD est associée avec la BBA et son SS… »
« J’en ai marre de ces acronymes ! Qui se soucie du fait que la BBA ait un service secret ! » Tyson était énervé, et lui parler ne changeait rien.
« Eh bien, on devrait puisque Kai en faisait
aussi partie ! »
« Il est probablement membre du country club de chaque pays de toute façon. » C’était marmonné mais ça reçu tout de même une réponse.
« Seulement Londre et Beijing, peut-être aussi Tokyo mais je ne me rappelle pas avoir rempli les papiers de celui-ci. » Tous les yeux se tournèrent vers la fenêtre et regardèrent d’un air choqué la personne qui se trouvait là, gouttant sur le parquet.
Tout se passa à toute vitesse. Le dénommé Luka sauta plus haut que quiconque aurait même envisagé sauter un jour, et atterrit gracieusement sur le toit de la voiture qui avait tenté de le renverser. Il grimaça quand une balle traversa le toit et faillit toucher son pied. Il roula sur le côté et tenta de détaler de l’autre côté de la rue pour rejoindre une certaine forme de sécurité dans l’arène (ou avec Kai, ça irait aussi.).
Il n’y parvint pas cependant. La voiture recula soudainement et il dut tournoyer sur le côté pour éviter une nouvelle collision. L’adrénaline se propagea dans son sang et il pivota et se mit à courir. La voiture le suivit, déterminée à tuer sa victime, et ignorant qu’un adolescent particulièrement énervé la suivait de près.
Kai courait aussi vite qu’il le pouvait, ses yeux suivant les cheveux roux qui disparaissaient lentement de son champ de vision. S’il y avait une chose qu’il maudissait par dessus tout actuellement, c’était que ce fichu Luka savait courir. Il se propulsa en avant, allant au delà de ses limites afin de pouvoir suivre le garçon. La voiture braquait ici et là sur le côté, tentant de l’écraser ou de lui tirer dessus. Les deux auraient fonctionné mais le garçon était vigilant. Il restait près des échoppes et des allées. Près d’endroits derrière lesquels il pouvait se dissimuler pour éviter les assauts meurtriers. On ne l’aurait pas sans combat.
« Kai ! Attend ! » Il l’ignora. Tyson ne le ralentirait pas quand il y avait un fou à la poursuite de son frère. Ca faisait longtemps qu’il ne l’avait pas appelé comme ça mais c’est ce qu’il était. Son frère, et il ne laisserait rien lui arriver alors qu’il venait juste de devenir libre.
Il entendit un autre bruit de freins et regarda à sa gauche. Il y avait une voiture juste à côté de lui, la vitre se baissa. Bryan. Il n’avait jamais été aussi heureux de le voir. Ian était dans le siège passager et Spencer à l’arrière.
« Monte ! » Cria Bryan avec urgence. Kai acquiesça mais ouvrit la porte du conducteur.
« Bouge. » lança-t-il, et Bryan se déplaça vers le siège du passager, envoyant Ian dans les sièges arrières. Kai attrapa le volant et fit à peine attention au claquement de la porte qui signifiait un nouveau passager avant de partir à toute vitesse dans les rues après la voiture qui pourchassait son ami.
« Woah, Kai, tu sais conduire ? » Il blêmit. Fichu Tyson. Grondant, mais n’ayant pas le temps de s’arrêter, il accéléra et passa une vitesse, il devait se dépêcher.
« Si ce n’est pas le cas, alors tu as choisi de monter dans la mauvaise voiture. » Arrêtez tout. Est-ce que Bryan venait de faire une blague ? Alertez les médias ! Tyson avait refermé la bouche. Il semblait avoir juste remarqué qui d’autre était dans la voiture. Oups.
Les choses ne se passaient pas bien pour Luka en revanche. Il se déplaçait à la vitesse d’une torpille et arrivait au bout des rues. Eux, en revanche, n’étaient pas à cours de balles. Il siffla quand l’une érafla son manteau tout neuf qu’on lui avait offert comme premier présent pour sa liberté. Une larme faillit couler, mais ce n’était pas le moment de pleurer. Il lui fallait trouver un endroit où courir se cacher.
Il était au bout de la route, ceci dit, et très vite le trottoir se changea en graviers. Il ne connaissait qu’un endroit qui serait assez bien pour lui laisser une chance de s’échapper. Un lac.. grand et avec un peu de chance gelé… Assez grand et assez marqué pour que les conducteurs de la voiture comprennent qu’ils pouvaient à tout moment couler s’ils essayaient de rouler dessus. Il sourit. Parfait.
Courant aussi vite qu’il le pouvait, il se cacha derrière les arbres à travers le sentier qui menait au lac. Il pouvait entendre cette fichue voiture qui tentait de le suivre du mieux qu’elle pouvait. Le sentier était assez grand pour elle, crotte.
Il accéléra cependant, courant de plus en plus vite jusqu’à ce que le lac soit dans son champ de vision. Il sourit et courut dessus avec une aisance qui avait mis des années à se perfectionner jusqu’à la moitié, satisfait lorsqu’il entendit la voiture s’arrêter abruptement. Il poursuivit cependant, il poursuivit car les balles étaient toujours une menace et qu’il ne doutait pas de leur précision.
Kai braqua le volant et perdit Luka de vue un instant avant que le roux ne tourne dans une rue de droite. Kai partit à gauche. Tyson cria et lui dit qu’il allait dans le mauvais sens mais Spencer lui répliqua de la fermer. Le japonais acquiesça, toujours intimidé par sa compagnie. Ça ne l’empêcha pas de laisser sa stupeur de côté et de crier à chaque fois qu’ils manquaient de heurter une voiture ou roulaient sur une bosse. Bryan se mit même à jurer et claqua sa main sur le tableau de bord après un choc particulièrement violent.
« Punaise Hiwatari, tu reçois enfin ta pu**** de Corvette et tu la défonces le même jour ! »
« Je te donne le tour que tu voulais avec, non ? Alors boucle-la ! » Rétorqua Kai furieusement et Tyson fronça les sourcils, confus. Il ne comprenait toujours pas ce qu’il se passait, mais était-ce lui, ou les Demolition Boys faisaient preuve d’humour ? Enfin, au moins Bryan, et c’était de l’humour sec qui le faisait frissonner. Il ne l’appréciait pas non plus.
Ils arrivèrent de l’autre côté du lac que les chasseurs. Luka arrivait au centre et trottait sagement vers eux. Kai sortit de la voiture et passa la main dans sa veste pour sortir quelque chose qui ressemblait à… un pistolet ? Les yeux de Tyson faillirent sortir de leurs orbites. Il ne pouvait pas croire ce qu’il voyait. Regardant en arrière il vit deux autres véhicules… des jeeps… arrivant derrière eux. Les autres Bladebreakers avaient attrapé une voiture et les avait suivis. Un homme inconnu et Mr Dickenson étaient dans la première, Max assis entre eux, Ray… et était-ce Lee ? Judy conduisait le dernier véhicule ; ce qui signifiait que les All Starz étaient là aussi… Et Mariah, Kevin et Gary s’empilaient à l’arrière.
Tous les yeux se tournèrent vers ce qu’il se passait sur le lac. Luka courait toujours pour sa vie, et Kai courait vers lui, brandissant son revolver tel un professionnel. Il tira, et il y eut un cri de l’autre côté du lac. Bien sûr que ces gars allaient conduire leur voiture à travers le parc de Moscou jusqu’au lac de cette même ville. Bryan se mit à sa droite et Spencer à sa gauche, chacun tirant sur ceux qui attaquaient leur ami.
Luka siffla avec colère quand l’une des balles passa dangereusement près de sa tête et leur cria de faire attention. Kai s’arrêta aussitôt et poursuivit sa course vers lui. Soudainement, cependant, la voiture reprit vie et accéléra, osant rouler sur le lac. Elle voulait rejoindre Luka avant Kai, et sur un tel terrain, il était clair qu’elle y parviendrait bientôt.
Spencer gronda en russe et visa l’avant du véhicule. Pow ! Elle partit en vrille, glissant sans que le conducteur, choqué, puisse faire quoi que ce soit. Puis un craquement retentit dans l’air. Luka s’immobilisa. Kai ne bougeait plus, et les spectateurs retinrent leur souffle.
Trop près. Luka était trop près de la voiture. Il osa regarder sous lui la craquelure qui s’étendait jusque sous ses pieds. Il ravala sa peur de la situation, et fit un pas en avant avec précaution. Crac ! Il regarda Kai, un peu plus loin et en sécurité par rapport aux craquelures qui se propageaient autour de lui. Les autres reculaient progressivement hors de la glace, laissant Kai jouer les sauveteurs. Ça n’aiderait personne si les cinq se retrouvaient dans l’eau.
« Cours Luka… Je te rattraperai si tu tombes. » murmura Kai doucement. Le roux acquiesça et courut à toute vitesse au delà des craquelures, tâchant de calculer ses pas alors que la glace s’effondrait suite à la pression qu’on exerçait dessus.
« Hey, un instant… est-ce que c’est Tala ? » S’exclama Tyson, et à ce moment, distrait de sa concentration, Luka leva la tête. Une balle du dernier tireur éveillé traversa son estomac. Kai hurla d’horreur alors qu’il voyait le roux trébucher. Des yeux bleus croisèrent le regard de Kai une dernière fois, et la glace se brisa, l’envoyant vers ce qui aurait dû être une mort glacée.Personne n’y croyait. La fille brune de l’hôpital se tenait devant eux, ses cheveux désordonnés et emmêlés mais toujours dans une queue de cheval têtue. Elle semblait frissonner à cause du froid et Tyson sentit une vague de sympathie envers elle avant de se rappeler de quel côté elle était. Définitivement pas le leur. Il lui adressa un regard noir auquel elle répondit par un joli sourire. Elle observa les regards abasourdis dans la pièce, autour d’elle.
« Bonjour, mon nom est Anna Jones. Enchantée. » dit-elle simplement, inclinant la tête et les désignant. Certains des membres les plus raisonnables et prévenants du groupe retournèrent leurs salutations et leur sourit avec appréciation.
Regardant Tyson qui avait à peine bougé un muscle et sûrement pas pour dire bonjour, elle sourit poliment. Il la regarda durement en retour. Ses mains attrapèrent un sac à dos qu’elle portait, elle inspira profondément, et le retira. Elle ne demanda même pas si ça les dérangeait, elle fit ce qu’elle voulait, et tout le monde était trop surpris, essayant de comprendre comment elle était apparue de la fenêtre, pour l’en empêcher.
Kevin examina même le rebord. Aucun signe de ce qu’elle avait fait. Pourtant elle l’avait fait. Déroutant… et plutôt dérangeant. Il ne comprenait pas ce qu’il s’était passé et ça l’ennuyait. Il la regarda espérant qu’elle explique mais elle continua à retirer des papiers de son sac et à les placer sur la table de salon. Tyson, en revanche, en avait assez. Il grogna et s’approcha d’elle. Furieux, et espérant se faire comprendre, il lui saisit rudement le bras.
« Vous voulez que je vous
aide ? » Elle sortir son bras de la prise et rejeta sa main sans même cligner des yeux. Lee le remarqua aussitôt. Elle était entraînée en arts martiaux. Était-elle de l’ISABD ? Il voulait savoir…
« Pour dire la vérité, non, je n’en ai pas besoin. » répondit-elle simplement, haussant les épaules comme si c’était évident. Tyson fronça les sourcils.
« Pardon ? »
« Vous ne pouvez pas m’aider, mais moi j’espérais vous aider. » Chaque mot était prononcé lentement, comme pour des simples d’esprit. C’était d'ailleurs clairement ce qu’elle pensait d'eux, car elle retourna à ses papiers et les ignora jusqu’à être satisfaite.
« Comme je le disais, mon nom est Anna Jones. Parfois Dama Anya… mais s’il vous plait appelez-moi Anna. Je travaille pour l’ISABD, le BBASS, et bien sûr Voltaire Hiwatari. » Tout le monde se figea à la mention de ce nom mais elle poursuivit comme si de rien n’était. « Je suis venue de mon propre accord, et j’espère que vous m’écouterez avant de tirer vos propres conclusions quant aux évènements qui ont transpiré ces derniers mois, en particulier ceux qui ont précédé et ont eu lieu sur le lac gelé. Le Championnat du Monde est l’un des plus importants pour vous je suppose ? » Elle parlait bien et son aisance en anglais était évidente pour tous. Sa voix n’avait pas d’accent. Née américaine peut-être ? Il n’y avait même pas une trace de russe dans ses mots. Ray acquiesça et lui adressa un siège. Elle le remercia gentiment mais lui dit que ça ne serait pas nécessaire. Elle partirait bientôt.
Kai bougea si vite que, alors que Dranzer était déjà sortie et faisait fondre la glace, les autres cherchaient encore à savoir à quel moment il avait trouvé le temps de se préparer et lancer sa blade. Ça ne prit pas longtemps, pas avec la chaleur spectaculaire de Dranzer. La glace avait fondu et on pouvait voir Luka respirant difficilement dans l’eau par dessous le phénix.
Il leva une main et attrapa une de ses serres, toussant en quête d’air alors qu’elle le déposait près de son maître. Kai prit Luka dans ses bras et murmura un silencieux « Dieu merci » à peine l'avait-il contre lui. Des bras pâles encerclèrent le cou de Kai, et alors que du sang tâchait le manteau blanc qu’il portait, Luka serra son frère contre lui. Kai jura silencieusement et souleva l’adolescent avant de courir en direction de la Corvette et des jeeps qui avaient amené les témoins jusqu’ici.
« Bryan, il faut que tu presses la plaie, il perd trop de sang… Spencer, j’ai besoin des coordonnées de l’hôpital le plus proche. Ian, va chercher la trousse de secours et aide Bryan sur les sièges arrières. Essayez de panser la blessure en attendant notre arrivée à l’hôpital. » Luka marmonnait des paroles incohérentes pendant que Kai donnait les ordres. Les russes agirent aussitôt malgré les regards surpris qu’on leur lançait. « Dégagez ces foutus véhicules de mon chemin, maintenant ! » Cria Kai en remarquant que le chemin de la corvette était bloqué par les autres. Aussitôt, les conducteurs acquiescèrent et se dispersèrent, au grand désarroi de leurs passagers. Tyson glapit et se précipita dans l’un des véhicules, réalisant bien vite qu’il n’avait pas sa place dans la voiture de sport.
Pour la première fois, Kai était heureux qu’on lui en ai promis deux, car il savait que la première était fichue. Du sang tâchait les sièges arrières, et les branches, pierres et autre obstacles lors de la course effrénée avaient abîmé la peinture. Lorsqu’ils atteignirent l’hôpital, la voiture fumait d’une manière inquiétante. Ça n’avait aucune importance cependant. Il quitta le volant et se concentra sur le fait de donner à Luka l’aide dont il avait désespérément besoin.
Cependant, alors que les infirmiers déposaient l’adolescent sur une civière, les portes s’ouvrirent et quelqu’un appela son nom. Il s’attendait à un adolescent de l’une des équipes qui les avaient suivis à l’hôpital, mais pas à la brune choquée sur le pas de la porte. Il leva les yeux vers elle et se figea. Dans sa main se trouvaient les morceaux de Wolborg, détruite, le spectre brillant légèrement sur sa paume. Elle avait les larmes aux yeux.
« Kai ? » demanda-t-elle en tremblant. Les autres équipes les regardaient avec confusion. Il jeta un œil à la civière et elle cria, courant en sa direction. « Luka ? » Il la saisit par la taille et la plaqua contre lui, l’empêchant de s’échapper. Elle se cambra et tenta de se dégager pour se rendre auprès du rouquin qu’on emmenait déjà en salle d'opération. « Luka ! »
« Shh Anya, tout ira bien. Nous sommes arrivés à temps. » Elle leva vers lui des yeux emplis de peur et il cala sa tête contre son épaule dans le geste le plus affectueux qu’on l’ai jamais vu faire. Il la berça et la garda contre lui alors qu’elle pleurait de plus en plus fort sur son épaule. Il ignora totalement les regards qu’on lui lançait. Ce n’était pas le moment.
« Que s’est-il passé ? » Articula-t-elle en le regardant. Il soupira et l’entraîna vers une chaise pour l’asseoir, puis commença à tout lui expliquer.
Pendant ce temps, Tyson se tourna vers Mr Dickenson et l’étrange homme qui l’accompagnait. Il voulait savoir ce qu’il se passait aussi. Pourquoi Kai avait-il un pistolet ? Pourquoi appelait-on Tala ‘Luka’ ? Pourquoi avait-on tiré sur Tala ? Et qui était la fille en pleurs ?
« Son nom est Anna, elle… travaille avec les Demolition Boys et Kai à l’occasion. » répondit Stanley. Tyson ne savait même pas qu’on avait posé la question, bien que ça lui en amène une nouvelle.
« En quoi ces deux là sont-ils connectés ? » Il ne comprenait pas. Kai n’avait été dans l’équipe des Demolition Boys que quelques jours, mais la manière dont il la tenait donnait l’impression qu’il la connaissait depuis toujours. « Ce sont nos ennemis ! » Les autres approuvèrent. Dans la salle d’attente, Bryan plissa les yeux et donna un coup de coude à Spencer, lui indiquant du menton d’écouter ce que l’homme avait à dire.
« Non mon garçon, ces garçons ne sont pas nos ennemis. En vérité, vous leur devez beaucoup à tous les cinq. » La voix était sévère et il était clair que l’homme ne plaisantait pas, ce qui arracha un sourire narquois à Ian.
« Quoi ? De quoi parlez-vous exactement ? Qu’est-ce que je pourrais bien leur devoir ! »
« Un instant Mr D… Cinq ? » intervint Ray. Il n’y avait que quatre Demolition Boys.
« Oui… Bien… Kai est inclut dans ce chiffre. » Répondit l’homme presque timidement.
« Pourquoi est-ce que vous continuez à le mettre avec eux ! Ils sont nos ennemis et il a quitté leur équipe ! »
« Silence Tyson ! Pas un mot de plus. Ces garçons ont risqué bien plus que vous pouvez imaginer quant à ce qu’il s’est passé durant la journée, et c’est grâce à eux que votre style de vie est ce qu’il est aujourd’hui. »
« De quoi parlez-vous ! »
« Eh bien, pour commencer, tu ne serais pas champion du Monde sans eux. » répliqua l’homme inconnu à côté de Mr Dickenson d’une voix dure et grave.
« Christopher- »
« Dis-leur la vérité Stanley, leurs plaintes me donnent mal à la tête et je ne suis là que pour Red**. » Il fit un geste en direction du garçon qui avait disparu dans la salle d’opération.
« Nous dire quoi ? » demanda Max avec curiosité, tentant de comprendre ce qu’il se passait. Toutes les autres équipes tendirent l’oreille. Elles voulaient savoir aussi.
« Eh bien… Cette année le tournoi de Beyblade a été un peu… truqué. » Tous les yeux s’agrandirent de choc et d’horreur. Ils ne pouvaient pas croire ce qu’ils entendaient. TRUQUE ? « Vous voyez, si Bio-Volt avait gagné une autre année… Comme vous l’avez appris… ils se seraient emparés du Monde. Ils planifiaient d’attaquer chaque pays, chaque nation, et de les contrôler avec les pouvoirs de Black Dranzer et des autres spectres. Pour empêcher ça, les Demolition Boys et Kai ont été inclus dans le projet Freefall. Ils ont été engagés dans la section Beyblade de l’ISA et dans les services secrets de la BBA… et avec l’aide d’Anna et de quelques autres personnes, ils ont réussi à stopper les plans guerriers de Boris. » Douze personne le regardèrent avec choc alors que l’homme poursuivait. « Pour le prix d’un titre de champion du Monde, les Demolition Boys ont, avec succès, non seulement sauvé le Monde mais aussi gagné leur liberté de l’Abbaye. Tous les quatre, ils peuvent désormais vivre libres et de la manière qu’ils souhaitent. » Il y eut un silence… avant que l’explosion n’ait lieu.Ayant apparemment fini ses préparations, elle laissa échapper un soupir et regarda les têtes des beybladers autour d’elle. Elle leur sourit poliment, mais une fois encore ils semblaient trop surpris pour avoir une réponse à lui adresser. Ça n’eut pas l’air de l’ennuyer.
« Je suis venue en ce jour car je pense que les évènements qui ont transpiré récemment, qui vous ont affectés vous ainsi que tous ceux ayant participé plus ou moins à ce tournoi, ne vous ont pas été complètement expliqués. Peut-être, si c’était le cas, pourriez-vous regarder ces garçons non pas avec dédain et colère, mais avec appréciation. Je sais que Kai a été spécialement blessé par les mots que vous avez prononcés à l’hôpital. »
« Vraiment, parce que ça n’en avait pas l’air. » rétorqua Tyson.
« Oh, honnêtement, Mr Granger, tu as passé assez de temps avec Kai pour réaliser qu’il ne dit jamais ce qu’il pense et manque terriblement d’assurance au sujet de ses émotions. » Il rit face à ces mots.
« Kai,
manquer d’assurance ? D’où as-tu péché ça, miss ! Kai est la personne la plus froide et impassible que je connaisse. Il n’a pas de véritables qualités humaines et il ne manque définitivement pas d’assurance. »
Elle se tourna et le fusilla du regard, ses yeux sombres et menaçants. Les autres dans la pièce frémirent avec maladresse alors qu’elle approchait Tyson, la colère évidente sur son visage. Ses poings étaient crispés et son visage menaçant.
« Je suis venue ici pour une seule et unique raison. Essayer de vous faire voir la vérité quant à ce qu’il s’est réellement passé lors de ce tournoi. Maintenant, si ça ne t’intéresse pas, et si tu es trop occupé à insulter un de mes plus chers compagnons alors tu peux juste sortir et rester l’imbécile arrogant immature et égoïste que tu sembles être intérieur comme extérieur. Si cependant ça t’intéresse de savoir pourquoi ils t’ont laissé gagner ce tournoi, alors tu peux descendre de tes grands chevaux et la boucler, car les prochains mots qui sortent de cette bouche auront intérêt à être des faits polis ou des questions et non pas des remarques narquoises. Je te jetterai hors de cette pièce si c’est ce qu’il faut pour pouvoir expliquer à ceux qui
sont intéressés. Compris ? »
Tyson acquiesça. Il ne pouvait pas faire grand chose d’autre. La fille n’allait pas l’écouter s’il ne l’avait pas fait de toute façon. Elle lui adressa un regard noir puis continua ce qu’elle avait commencé. Se retournant vers les reste de la pièce, elle poursuivit.
« Kai vous a menti à tous, et pour une bonne raison. Je vais essayer de planter le décor au mieux possible, si vous voulez m’écouter ? » Il y eut quelques hochements de tête. « Tala Ivanov, ou plutôt Luka Ivanov, est le frère de Kai. »
« Quoi ? » Ils ne pouvaient en croire leurs oreilles. Toute la pièce se mit à crier des questions. Personne ne pouvait comprendre ce qu’ils disaient les uns les autres. Finalement, quelqu’un cria : « Leurs noms de famille sont différents ! »
« Pas vraiment. Kai a pris le nom de jeune fille de sa mère, alors que Luka a le nom de leur père. Kai n’est même pas son vrai prénom. Son vrai nom est Sacha Ivanov, mais ce nom est vite devenu tabou après la mort de Mr et Mme Ivanov. »
« Sasha ? » se moqua Tyson. « C’est un nom de fille ! »
« Pas
Sasha, idiot,
Sa-ch-
a. » Elle roula des yeux. « Ça veut dire protecteur des Hommes si vous
devez savoir. Ça n’a pas vraiment d’importance, personne ne l’appelle comme ça à part Luka et ça reste rare. Luka et Kai ont tous deux été élevés par l’Abbaye comme, je pense, vous en a informé Boris. Kai est né là-bas, et Luka est arrivé quelques années plus tard. Pendant qu’ils y étaient il leur est arrivé… de nombreux… désastres… » Elle attrapa et ouvrit un des dossiers, tendant quelques photos à des personnes dans la salle. Des sons choqués retentirent. « Être fouetté était chose commune, être battu, en général, l’était encore plus. Ils, tout comme les autres Demolition Boys qui arrivèrent peu après Luka, étaient traités de la pire des manières car ils étaient supposés être les meilleurs. »
Une des photos était de Kai, sûrement pas plus vieux que six ou sept ans. Il regardait la caméra avec des yeux morts. On voyait de nombreux bleus sur son visage. Il y avait des coupures sur ses épaules, et son torse était rouge sous l’effet d’une hémorragie interne. Cependant, le pire était son dos. On y voyait des douzaines de profondes marques de fouet. On l’avait battu si durement que la vie semblait l’avoir quitté.
Sur la suivante, il y avait Tala. Son bras droit était détruit. Des centaines de coupures le parsemaient de haut en bas. Il saignait abondamment, et le garçon lui-même était inconscient. On pouvait voir des docteurs essayer d’en retirer du verre. On aurait dit qu’on l’avait passé dans une déchiqueteuse. C’était horrible. Même Tyson ne pouvait pas lancer de remarque sarcastique à ce sujet. Il n’y avait rien de bon à dire. Rien de bon du tout.
« Chaque jour on les entraînait aux portes de la mort. On les forçait à travailler plus dur que tout autre étudiant de l’Abbaye, et s’il y avait le moindre risque d’échec, Boris et les gardes les battaient sévèrement. Luka et Kai ont faillit réussir à échapper à l’Abbaye quand leurs parents ont découvert ce qu’il s’y tramait… Mais on a provoqué un accident de voiture pour les assassiner, et au final ils ont tout deux passé la majorité de leur vie là-bas. »
Choqués au point de ne plus savoir parler les équipes ne pouvaient en croire leurs oreilles. Que Kai ait un frère et que leurs parents aient été assassinés, qu’ils aient été envoyés vivre à l’Abbaye après un tel incident juste pour que leur vie soit faite d’horreur constante… C’était digne d’un cauchemar.
« Les Demolition Boys et Kai ont été lentement mais sûrement contactés par l’ISABD et le BBASS. Durant les six dernières années ces garçons n’ont rien fait d’autre que se placer sous le fouet de Boris et se sacrifier volontairement dans le seul but de glaner des informations que l’ISABD pourrait utiliser. Kai est celui qui s’en est le mieux tiré car après un terrible… accident… il a perdu une part de sa mémoire et a pu quitter l’Abbaye pour de bon. Tout le monde a travaillé ensemble pendant six ans pour stopper Boris, et ce championnat du Monde était la chose dont ils avaient besoin pour gagner leur liberté… Je ne m’attends pas à ce que vous m’écoutiez ou me croyiez. Donc je vous ai amenés des preuves que vous pouvez regarder. Ce ne sont que des photocopies bien sûr, je ne vous apporterais pas les originales… Mais ceci est une copie de plusieurs centaines de cassettes de caméras de surveillance à travers le Monde. » Elle souleva un DVD de la pile. Leur souriant légèrement, elle le désigna. « Ça a été compilé dans l’ordre chronologique, commençant quand les garçons ont rejoint l’Abbaye jusqu’à la fin du championnat du Monde. Si vous le regardez… Ça dure plusieurs heures… Je pense que votre opinion risque de différer. »
Elle le tendit à Ray, qui lui semblait apparemment la personne la plus digne de confiance du groupe, et leur sourit. Puis avec un au revoir marmonné, elle retourna vers la fenêtre.
« Qu’est-ce que tu fais ? » s’exclama Michael avec horreur.
« Oh, c’est juste plus rapide. » Et sans un mot de plus et passa par dessus la rambarde du balcon et disparu de leur vision. Confus et essayant de comprendre ce qu'il venait de se passer, Ray s’approcha de la télé et plaça le DVD dans le lecteur. Inspirant profondément, il appuya sur « lecture ».
* International Security Agency Beyblading Division (Agence de sécurité internationale ; division beyblade)
** Red est un surnom courant donné aux personnes ayant les cheveux roux (en Angleterre et en Amérique), le changer pour « Rouge » me semblait un peu stupide et même si ça aurait facilement pu devenir « le roux », je le répète assez souvent comme ça.